Chronique

Enseigner dans des milieux à risqueUne tâche difficile pour les nouveaux diplômés

« C'est important pour notre société de ne pas perdre toute cette richesse que représentent les enfants », explique Nicole Tremblay, la directrice du module d'enseignement préscolaire et primaire. (Photo Rocket Lavoie)
CHICOUTIMI – La présence d’enseignants débutants dans les milieux à risque entraînerait un fort taux d’abandon de la profession, le tiers des diplômés quittant l’enseignement à l’intérieur des trois premières années de leur nouvelle carrière, expose le Conseil national de l’insertion professionnelle en enseignement, dans une étude publiée en 2007. Face à cette problématique, des chercheurs de l’UQAC tentent de faire leur part pour s’assurer que les futurs enseignants auront les connaissances nécessaires pour faire face à la réalité, souvent dure, des milieux à risque.

Une « recherche-action » visant à améliorer la formation des futurs enseignants, en collaboration avec les écoles des milieux défavorisés et à encourager la pratique de collaboration des familles, se tient depuis 2008 à l’Université du Québec à Chicoutimi.

« Le ministère de l’Éducation, du Loisir et du Sport du Québec a fait un classement des écoles selon leur indice de « défavorisation », explique la professeure-chercheuse du Département des sciences de l’éducation et de psychologie et directrice du module d’enseignement préscolaire et primaire, Nicole Tremblay. Il y a au moins une cinquantaine d’écoles dans la région qui sont dites à risque. Deux grands critères sont utilisés afin de connaître le degré de « défavorisation » d’un enfant, soit le degré de scolarité de sa mère et le fait que ses parents sont sur le marché du travail ou non. Ça donne souvent un indice du côté économique aussi. »

Bien que les écoles à risque soient situées partout dans la région, on en dénombre davantage au sein des commissions scolaires du Pays-des-Bleuets et du Lac Saint-Jean.

Stages

« L’an dernier, nous avons envoyé douze stagiaires dans différentes écoles à risque. Notre intention était que les étudiants au baccalauréat fassent un projet avec les parents de leurs élèves. Souvent, les parents ont des réticences face à l’école et malheureusement, ça se répercute sur les enfants, poursuit madame Tremblay. L’expérience a été très positive. Nous répétons cette année, mais avec des étudiants de dernière année au baccalauréat et non de deuxième. »

Éventuellement, à la suite de cette recherche, le baccalauréat en éducation préscolaire et en enseignement au primaire pourrait inclure des cours sur l’enseignement dans les milieux à risque.

« Il faut réellement mieux former les enseignants face à cette réalité, ça, c’est certain. Le taux de décrochage est deux fois plus élevé (36,6 %) pour les élèves provenant de milieux défavorisés qu’il ne l’est, pour les autres (19,6 %). C’est au primaire que nous préparons les jeunes et c’est important qu’on le fasse de la bonne manière. »

« C’est fondamental pour notre société de ne pas perdre toute cette richesse que représentent les enfants. »

Les jeunes enseignants se retrouvent normalement avec les classes dont leurs collègues ayant plus d’ancienneté n’ont pas voulu.

« Ils sont souvent éloignés des grands centres et dans des classes multiâge. C’est très dur. Si on ne les forme pas, ils auront des problèmes. C’est vraiment triste de penser au nombre de jeunes enseignants qui quittent la profession moins de cinq ans après avoir commencé à pratiquer. »

Recherche

En plus de madame Tremblay, d’autres professeurs de l’UQAC, Catherine Dumoulin, Mathieu Gagnon, Renaud Gagnon et Patrick Giroux, participent également à la recherche. Mélanie Pelletier et Philippe Côté, en leur qualité d’assistants de recherche, collaborent étroitement au projet.

La rédaction du rapport final de la recherche devrait se faire cette année.

Le Quotidien, 23 janvier 2010
Un texte de Katerine Belley-Murray